Fin 2018, la France s’était dotée d’une stratégie d’internationalisation de l’enseignement supérieur décennale, « Bienvenue en France », avec un objectif ambitieux et marquant : accueillir un demi-million d’étudiants internationaux d’ici à 2027. Alors que nous nous approchons progressivement de l’échéance, la croissance continue du nombre d’étudiants internationaux – 430 000 en 2023-2024 – nous permettra sans doute d’atteindre cet horizon chiffré, malgré les ralentissements mondiaux occasionnés par la crise sanitaire sur la période.
Mais le contexte mondial et français a énormément évolué depuis l’acte de naissance de cette politique : fixé dans un monde où l’attractivité relevait de l’évidence, cet objectif sera atteint dans un environnement marqué par l’instabilité géopolitique, où les questions d’immigration prennent bien souvent le pas sur les enjeux d’attractivité. Si la croissance stable de l’attractivité académique française peut être mise au crédit de la stratégie Bienvenue en France, il semble indispensable aujourd’hui de rappeler l’importance d’accueillir cette mobilité pour notre écosystème d’enseignement supérieur et de recherche, pour le maintien de notre place dans le monde, pour notre économie et notre société. La livraison annuelle des Chiffres clés, sa perspective comparatiste et mondiale et son approche de long terme permettent d’étayer cette réflexion.
La France doit continuer à rayonner via son enseignement supérieur et sa recherche
La France, 7e pays d’accueil mondial, talonnée par la Turquie, connaît une croissance du nombre d’étudiants internationaux accueillis de 21 % sur cinq ans, un taux cependant inférieur au développement mondial de la mobilité sur la période (+27 %). L’intense compétition que reflète l’analyse des mobilités pour l’accueil des étudiants internationaux justifie en soi l’accent mis sur son développement en France. Mais le développement quantitatif ne doit se faire qu’en étudiant les conséquences recherchées, à différents niveaux, national comme international, comme le préconise le récent rapport d’évaluation de l’attractivité de l’enseignement supérieur de la Cour des comptes1. Recevoir les meilleurs étudiants du monde entier récompense souvent le fait d’occuper une position scientifique de premier plan, au sein d’une économie robuste : ce n’est jamais un acquis2. Ces étudiants brigués par un grand nombre de pays sont en retour porteurs de nombreuses « externalités » positives, à court comme à moyen terme. Ils et elles internationalisent nos formations, nous permettent de bénéficier d’échanges et de mobilités réciproques avec un grand nombre de pays, sont porteurs d’innovation et peuvent renforcer certains domaines professionnels où existent des difficultés de recrutement. C’est ce que nous observons à travers les carrières aussi brillantes que diversifiées de nos alumni internationaux, qui contribuent à faire vivre le français, et à ouvrir l’économie de notre pays à de multiples secteurs et régions du monde3.
« Recevoir les meilleurs étudiants récompense une position scientifique de premier plan. »
Une affirmation européenne pour la science et son ouverture internationale
En matière d’internationalisation de l’enseignement supérieur et de la recherche, la France bénéficie dans le monde d’une image et d’une réputation d’ouverture et d’excellence forgées par une histoire ancienne et renforcées par les distinctions, laboratoires et équipements de pointe, position dans les classements ainsi que par son rôle dans l’accueil des scientifiques et étudiants issus de pays en crise, avec tout dernièrement, la mobilisation d’établissements d’enseignement supérieur français pour accueillir des chercheurs étatsuniens en difficulté dans leur pays4. Protagoniste, aux côtés de ses voisins, de l’élan européen, elle est à-même de contribuer à forger une position commune à l’échelle européenne, en faveur de la science et de la recherche de pointe, dans tous les domaines, des libertés académiques, mais aussi de la large diffusion de l’ethos scientifique, de rapport aux faits et à la démonstration. À l’heure où les transformations du monde sont plus que jamais liées à la maîtrise technologique, à la diffusion de l’information, aux usages multiples de l’intelligence artificielle et que les applications de la connaissance sont tangibles, depuis le changement climatique jusqu’aux crises au sein de régimes démocratiques établis de longue date, la défense d’une science qui se construit par l’ouverture internationale, apparait comme nécessaire. En Europe, 1re région d’accueil des étudiants mobiles dans le monde, mais aussi première zone où sont réalisés des doctorats dans le monde, nous pouvons nous appuyer sur l’interconnexion et la convergence de nos systèmes, issue du processus de Bologne ainsi que sur les universités européennes, pour défendre une vision commune de l’éducation et de la science et de leur rôle central dans nos sociétés.
2 Ainsi, l’attractivité du doctorat en France, 4e pays d’accueil à ce niveau, est en baisse sur les dernières années, voir p. 44.
3 https://www.campusfrance.org/fr/ressource/enquete-parcours-des-alumni
4 « Choose France for Science », opéré par l’Agence nationale de la recherche, dans le cadre de France 2030, doit permettre aux établissements de solliciter un cofinancement de l’État pour l’accueil de chercheurs empêchés.
Campus France — chiffres clés 2025